« Le trafic ne revient pas dans les hypers : tout est parti en ligne”

Thomas Pocher, adhérent E.Leclerc dans le Nord de la France, est l’initiateur des drives piétons. Face aux levées de fonds des acteurs du Quick Commerce et à l'accélération de Carrefour et Auchan sur ce format, il appelle les retailers à doper leurs investissements. Maintenant.

Par . Publié le 15 octobre 2021 à 16h00 - Mis à jour le 05 novembre 2021 à 13h52

En septembre 2021, Gorillas a levé US$ 950 millions, Cajoo US$ 40 millions et Flink a reçu le soutien de l’Américain DoorDash. Qu’en pensez-vous ?

Thomas Pocher : Les levées de fonds des acteurs du Quick Commerce sont pharamineuses. Les marchés financiers s’imaginent qu’on peut remplacer les supers et les hypers par le quick commerce, mais je m’étonne du manque de pragmatisme commerçant des financiers. Depuis 10 ans, j’ai développé des drives (en voiture d’abord, puis piétons à partir de 2017) en m’appuyant sur des entrepôts d’e-commerce.

J’ai aujourd’hui 3 drives automobiles (panier moyen de € 120) et 3 drives piétons (panier moyen de € 40). La taille du marché du dépannage n’a rien à voir avec celui des grosses courses hebdomadaires.

Quels sont les chiffres de votre activité e-commerce ?

T.P. : Depuis le confinement, les grands hypers se sont pris une joute, et le trafic n’est pas non plus revenu sur les petits supermarchés de province : tout le trafic est parti en ligne. Sur nos 8000 à 10000 commandes hebdomadaires, 80 % sont retirées aux drives voiture, 15 % aux drives piétons et 5 % sont livrées à domicile. La préparation se fait uniquement en entrepôts e-commerce, car j’ai toujours eu peur de la préparation faite en magasin. Les clients ont accès à 13.000 références et les commandes font 100 kilos en moyenne. Pour € 100 de commandes réalisées en drive, mes frais de fonctionnement sont déjà inférieurs à ceux de l’hypermarché. Je recrute 100 % de mes nouveaux clients via le drive, et 90 % des clients du drive ne vont jamais dans mes magasins.

Quel message voulez-vous faire passer au groupement E.Leclerc ? 

Thomas Pocher : Il faut accélérer notre capacité à investir sur les nouveaux canaux, sur les projets qui ne sont pas l’hypermarché. J’essaye d’être un influenceur en interne. L’hypermarché n’est pas mort, mais il ne respire plus. Pour moi, il est urgent d’investir sur les entrepôts e-commerce pour répondre aux commandes des clients en flux tendus en prenant les emplacements avant les autres. Il faut aussi investir sur les bonnes modalités de mise à disposition aux clients. C’est une urgence pour tous les retailers historiques. Carrefour et Auchan l’ont bien compris !