Retail media et data retail, au cœur d’une nouvelle collaboration marques / enseignes

A la suite du Publicis Retail Morning du 6 juillet, Mind Retail synthétise les enjeux de la data retail dans un format Essentiel : panorama du marché, chiffres clés, annonces récentes, enjeux du côté marques et des retailers et tour d'horizon des acteurs en présence.

Par . Publié le 30 juillet 2021 à 11h54 - Mis à jour le 26 octobre 2022 à 12h01

Contexte. La grande distribution alimentaire (Walmart, Tesco, Carrefour…) est historiquement très avancée en termes de données transactionnelles offline. Mais, avec la progression de l’e-commerce (13 % du retail en France et 28 % au RU en 2020), ces données se sont considérablement enrichies. Beaucoup de retailers prennent aujourd’hui conscience de son potentiel et veulent la monétiser via une stratégie de retail media. En effet, ces données ont une valeur considérable tant pour les retailers que pour des marques souhaitant mieux piloter leurs campagnes marketing. En 2021, le retail media est le levier qui croît le plus dans les dispositifs de marketing digital. Depuis le Covid, l’accélération est réelle.

Définition. Retail Media : mise à disposition des données retail aux fournisseurs, afin d’optimiser leurs budgets média et trade marketing, en allant cibler les acheteurs ou les intentionnistes d’une catégorie de produits. Le sujet va plus loin que la monétisation publicitaire et l’activation média, née dans les années 2000. 

Chiffres Clés 

Part du « online » en 2020. Dans les PGC, l’e-commerce a représenté 12 % des ventes au RU et 1,4 % en Allemagne (Nielsen). Pour les produits techniques (smartphones, électroménager), il a généré 61 % des ventes au RU et 23 % en Italie. Dans la mode, il a pesé 23 % des ventes en France (Fevad).

Potentiel

En 2020, 60 % des revenus d’Alibaba étaient issus du retail media.

En 2021, Amazon devrait atteindre plus de US$ 30 milliards de revenus en retail media. Chez Zalando, le retail media représente 1,5% de la Gross Merchandise Value. L’objectif fixé à long-terme est entre 3 % et 4 % de la GMV.

Chez Tesco, il s’élève à plusieurs centaines de millions d’euros par an. 

Sa rentabilité est celle des médias et non celle du retail (moins de 2% en GMS). Depuis 10 ans, au niveau mondial, les acteurs de la GMS ont perdu 50% de leurs profits. 

Panorama du marché

Les acteurs en présence. Si la GMS est plus avancée, le potentiel du Retail Media est réel dans le non-alimentaire et les marketplaces. Les USA sont plus avancés que l’Europe, mais les choses changent rapidement. Target s’est lancé massivement dans le retail media depuis 2019 avec Liveramp, ainsi que Walmart. Dans les drusgtores, on peut citer CVS et Walgreens. En France, Leclerc est en train de structurer son offre de retail media. Auchan avait une stratégie offensive, qu’il a finalement abandonnée pour la confier à ses pays de façon indépendante, d’où une mise en œuvre plus lente. ManoMano utilise Mabaya pour monétiser son audience. En Belgique, Ahold essaye de se mettre en route sur le sujet. En Allemagne, Rewe est très actif sur la partie digital media, et monte en puissance sur le retail media. 

Faits récents 

  • Février 21 : rachat de Thunder par Walmart (USA)
  • Avril 21 : Dollar Tree (USA) se lance dans le retail media
  • Mai 21 : Criteo signe un accord mondial avec Douglas (Nocibé)
  • Juin 21 : Carrefour lance sa plateforme Carrefour Links
  • Sept 21 : Fnac Darty lance MyRetailLink

Les enjeux côté retailers

Des retailers en position de force. Les évolutions juridiques sur le consentement donnent de plus en plus de valeur à la donnée des enseignes. Celle-ci est rare, exclusive et elle leur appartient. Elle est également unifiée (parcours d’achats en magasin et sur le Web) pour une vision client à 360°. Enfin, c’est la seule data permettant de mesurer l’impact sur les ventes. Mais pour déployer une plateforme de retail media, il existe une barrière à l’entrée pour les petits retailers. Il faut une taille critique (être n°1 ou n°2 sur son marché) pour développer ses propres outils.

Une source de revenus additionnels. Pour un retailer, qui dit retail media dit création de valeur. « Pour une enseigne à maturité, le potentiel du retail media peut atteindre 1% de son CA et 30 % à 40 % de sa rentabilité, a déclaré Tanguy Pincemin, Head of Sales EMEA chez Dunnhumby ». Le retail media est aussi un levier de marge permettant d’accélérer dans l’e-commerce, qui est souvent une activité à perte, et se battre contre Amazon en utilisant les mêmes armes. « En retail media, le niveau de marge est entre 15% et 40 % des investissements réalisés, a déclaré Stanislas Lajouanie, Head of Growth chez Liveramp. Le ticket d’entrée est réel, car il faut investir dans la fiabilisation de la data et la robustesse des process, mais ensuite, ce n’est que de la marge ». Le retail media doit aussi avoir un effet sur le « core business », via une hausse de CA associé. Chez Tesco, l’impact sur le CA est de l’ordre de 1 % à 2 %.  

Offline / Online. Des typologies de data distinctes. La data des pure-players reste plus précise que celle des enseignes offline. Là où un site Web collecte ses données d’une seule manière, le retailer physique doit les consolider (sorties caisses, carte de fidélité en partie obsolètes…) puis les réconcilier avec celles du Web. Ensuite, un retailer physique sait ce qu’il se passe en caisse mais pas en rayon : il n’a pas de donnée d’intentionnistes, contrairement à un Amazon ou un CDiscount. Si en PGC, un Nestlé et l’Oréal cherchera plutôt à cibler des acheteurs pour faire du volume, un Samsung sera par exemple plus intéressé par les intentionnistes smartphones. La data des acteurs GMS s’appuie aussi sur une fréquence d’achat plus importante. Au global, elle est entre 2 et 3 fois plus chère que celle des pure-players.

Une approche à désiloter. Peu de plateformes de retail media offrent une approche omnicanale. La plupart se concentrent sur le online sans intégrer les magasins, qui représentent 90 % des ventes en GMS et 50 % à 60 % pour les produits techniques. Pour les marques, l’enjeu est donc de parvenir à intégrer le magasin de façon native dans leurs plans de retail média, pour activer des campagnes online et offline (bannières Web, Search, allées centrales ou TG en magasins, bons de réduction). C’est ce que préconise Dunnhumby.

Les enjeux côté marques

Des équipes à aligner. Côté marques, ce sujet réunit les équipes commerciales et marketing. Certaines ont dédié des équipes au retail media (Seb, Samsung, Candy-Hoover) qui sont souvent rattachés à la DG. Chez les plus petits fournisseurs, le sujet est plutôt dans les équipes marketing, mais il oblige le commercial et le marketing à travailler main dans la main, ce qui est nouveau. 

Cas d’usages côté marques. L’intérêt du retail media est de mesurer le ROI de toutes les actions marketing et media : le ROS (Run Of Site, ou CA généré avec un budget marketing dédié), le ROPO (Research Offline, Purchase Online), le CA issu des recommandations de produits (chez Carrefour, 23 % des produits mis au panier résultent des algorithmes de recommandation), etc.

Un besoin de conseil. Au sein des agences de publicité, le développement d’un marché de conseil grandit. C’est la mission de Publicis Commerce notamment, qui conseille les marques dans leurs stratégies d’investissements. Le retail media implique aussi un passage à un media planning plus holistique.

Les acteurs à suivre : Carrefour Links, Criteo, Dunnhumby, Liveramp, Mabaya, Mediarithmics, MyRetailLink, RelevanC, Thunder, Xandr…